Depuis les premières attaques de hackers chinois contre des sites américains dans les années 2000 jusqu’aux récents vols de documents diplomatiques européens, en passant par l’offensive du géant Huawei sur la 5G, enquête et révélations sur l’émergence de la cyberpuissance chinoise.
Les nouveaux soldats de la Chine
Internet est le théâtre d’un conflit de forte intensité sur fond d’intérêts commerciaux et géopolitiques dans lequel tous les coups sont permis. Ces vingt dernières années, un acteur aux ambitions débordantes s’est imposé. La Chine ne cache plus sa volonté d’outrepasser les États-Unis – cible privilégiée de ses cyberattaques – en devenant la première puissance mondiale. Au début des années 2000, de jeunes pirates patriotes chinois, agissant indépendamment de l’autorité étatique, défiguraient les sites web américains – comme celui de l’US Navy – en y affichant des slogans politiques. Depuis, les capacités numériques de l’Empire du Milieu ont changé d’échelle. D’après les États-Unis, le pays se livre aujourd’hui à un vol sans précédent d’informations industrielles et commerciales pour nourrir son développement. Après plusieurs intrusions informatiques contre des entreprises américaines, les responsables étasuniens ont publiquement accusé des hackers chinois. Mais l’Union européenne, pourtant victime du vol de milliers de documents diplomatiques par la Chine, rechigne à la pointer du doigt, de peur de froisser celle qui est son premier partenaire commercial. Les Vingt-Sept sont également confrontés à une question majeure : faut-il faire confiance au géant Huawei, qui entend bien devenir l’un de ses fournisseurs d’équipements 5G, mais que les États-Unis décrivent comme le bras armé numérique du Parti communiste chinois ?
Fuite de documents
Au moyen d’interviews de hackers, de spécialistes et de responsables de la cybersécurité au sein d’institutions et d’entreprises, cette enquête, découpée en trois parties (les premières cyberattaques sino-américaines, la position de l’Europe, les inquiétudes vis-à-vis de Huawei) et tournée aux quatre coins du monde, décrypte la stratégie du “géant qui sommeille” pour conquérir le leadership technologique mondial. En prenant soin de vérifier les affirmations des intervenants américains au discours très offensif, les journalistes Thomas Lafarge et Rémi Labed donnent une dimension supplémentaire à leur investigation : ils parviennent à remonter à la source de la fuite de documents confidentiels européens – une société informatique basée dans le sud-est du pays communiste –, confirmant ainsi son origine chinoise. Une pièce de valeur apportée à un dossier qui n’a pas fini de s’étoffer…